Lundi 13 janvier au soir se tenait la projection du documentaire très attendu sur le financement de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy « Personne n’y comprend rien » de Yannick Kergoat. Celle-ci avait lieu au cinéma caennais indépendant « Le Lux »  et le Club était partenaire de la soirée.

La salle de projection était comble avec 200 spectateurs impatients de comprendre l’un des plus grands scandales de la 5e république et participer à l’échange qui a suivi en présence de la productrice Gabrielle Juhel et du journaliste au pôle « Enquête » de Mediapart, David Perrotin.

 

Après 1h45 de projection du documentaire qui retrace douze années d’investigation de la part des journalistes de Médiapart sur les liens entre l’ancien président de la République et le dictateur libyen Kadhafi, le débat a commencé par les questions du public dont : Est-ce que les enquêteurs et les journalistes ont eu peur pour leur vie ? David Perrotin a alors répondu que « des pressions et menaces, on en reçoit beaucoup chez Mediapart et dans les autres médias aussi. Ça abime la presse, on attaque un pouvoir, celui d’avoir le droit de savoir ! ».

Est-ce une coïncidence que la reportage sorte en même temps que le procès se tient ? La réalisatrice, Gabrielle Juhel a indiqué que « la date de sortie a toujours été annoncée concomitante au début du procès sur le financement libyen. Pour donner des clefs de compréhension aux citoyens face au procès qui allait se jouer. On a écrit, financé et lancé le reportage en un an pour qu’il soit visible au début de ce procès ».

Est-ce que le lien entre la politique, les gens de pouvoir et les médias s’est renforcé depuis le reportage “Les nouveaux chiens de gardes” ? “On a la chance d’être totalement indépendant et donc de prendre le temps », a rappelé David Perrotin. « Même si la situation s’est aggravée avec la concentration des pouvoir comme le rachat de rédactions par des milliardaires qui sont du même microcosme… Au-delà de cette main mise, la primauté à l’opinion (plateau TV, éditorialiste… qui disent “y’a rien dans ce dossier !” ou encore certaine émission de divertissement qui désormais amènent des sujets d’opinion en plateau. On se fout de ce qui est vrai ou faux ! ».

Pourquoi ce documentaire ne passe-t-il pas à la télévision ? La réalisatrice a rappelé que « ce n’est pas une commande… Le propos n’aurait pas du tout été le même. Le cinéma en France est encore un espace de liberté ». Elle a remercié chaleureusement les 10 178  donateurs, « qui nous ont donné toute la liberté pour réaliser ce reportage. »

Très peu de médias se sont fait le relai de votre documentaire, est-ce qu’il y a un manque de soutien ? Une compétition entre vous ? « France Inter, Le Monde, Libération ou encore Le Canard Enchaîné et d’autres se sont fait le relai de la sortie du documentaire. On ne s’attendait pas non plus beaucoup de publicité » est intervenu David Perrotin.
« Dans toutes les rédactions, vous avez de bons journalistes et de bons enquêteurs. Après pour certaines, il y a des actionnaires, des financements…. Et certains médias oublient leur rôle d’informer les citoyens » La réalisatrice a alors poursuivi en rappelant l’affaire du Watergate qui a amené à la démission de Nixon. En France, on ne s’indigne plus. Mais il faut « refuser le silence et la démagogie ».

David Perrotin et Gabrielle Juhel étaient accompagnés sur scène par des représentants d’Anticor et un journaliste de Grand format / Fakir.